Par Raouf KHALSI

Ce n’est pas un coup de tonnerre et encore moins quelque chose d’inédit. « Sanctuaire » des droits humains, le parlement européen s’est fondu en vindictes à l’endroit de la Tunisie, enrobant le tout d’un vote de 496 voix contre 28 non et 13 abstentions et demandant à l’UE la suspension les programmes spécifiques de soutien aux ministères de la Justice et de l’Intérieur. C’est cousu de fil noir, dans la mesure où les édiles parlementaires européens jugent que ces deux ministères sont les supports de la politique de Kais Saied. M. Borell se frotte les mains.

Au demeurant, il n’y a pas à s’étonner de ce que le parlement européen prenne cette attitude, en ce moment précis  où la Tunisie négocie un virage déterminant avec le FMI. Moyen de pression ? Quelque part, oui.

En gros, les eurodéputés reprochent à la Tunisie « la détérioration de la situation des droits humains ». En filigrane, toute l’opération « mani puliti » enclenchée par l’Etat. En arrière-plan, le 25 juillet et, pour tout dire, Kais Saied.

S’il ne suffisait que d’être dévot et ancré aux soubresauts étrangers, cela ferait longtemps que la Tunisie aurait bradé sa propre souveraineté, comme elle a risqué de le faire durant les années de chape de plomb sous le régime ayant sévi durant une décennie de hautes turbulences.

S’il ne suffisait que de psalmodier la déclaration universelle des droits de l’homme, au mieux la Tunisie serait aujourd’hui un vulgaire perroquet, au pire un satellite vassalisé à des idéologies contre-nature.

Ici, il s’agit de souveraineté et de politique intérieure souveraine. Nos problèmes, nous les réglons entre nous.

La Justice tranchera et se prononcera sur ceux qui comparaîtront devant elle. Cela s’appelle là aussi « souveraineté ».

Sans doute, devrions-nous admettre que c’est là un gros chantier. Et c’est même le chemin le plus difficile pour qu’émerge enfin un Etat de droit.

La situation socioéconomique qui « inquiète » tant les eurodéputés ? Quel humanisme !

« Le discours raciste » à l’endroit des immigrés subsahariens ? Qu’en pensent les ailes populistes au sein du parlement européen, celles -là mêmes qui prônent le renvoi des immigrés chez eux, sans distinction de race, ni de couleur ?

Encore une fois, c’est une question de timing. Les droits humains ne s’accomplissent réellement nulle part dans le monde. Pas plus en Europe qu’en Tunisie. En ce qui nous concerne, nous avons encore du pain sur la planche. Mais les commandements venus d’une Europe qui s’en fait le héraut et  le défenseur acharné ne sauraient s’ériger en loi divine. Parce que le fait est là : la Tunisie est dans une logique souverainiste. En d’autres termes, elle n’est pas à vendre.